La création et l’artisanat retrouvent aujourd’hui leurs lettres de noblesse grâce à l’émergence du consommer moins mais mieux, à l’envie de travailler sur un projet porteur de sens et au goût prononcé pour les objets ayant une histoire à raconter. C’est sur ce principe qu’Amina et Philéas ont créé Le Cléateur, une entreprise artisanale qui surcycle les clés anciennes en bijoux de luxe. Un projet né alors qu’ils effectuaient un tour du monde en camping-car et qu’ils cherchaient une activité professionnelle nomade.
Le Cléateur c’est aussi un pari fou, celui de retrouver les propriétaires des cadenas d’amour qui ont été retirés du Pont des Arts à Paris l’été dernier, évoquant l’adage qu’aujourd’hui tout est possible à celui qui ose !
Amina et Philéas nous en disent plus :
C’est quoi Le Cléateur ?
Le Cléateur est une toute nouvelle marque de bijoux haut de gamme. Nous surcyclons des clés anciennes par plaquage de métaux précieux pour en faire des pièces uniques et authentiques, porteuses de sens. Nous proposons à nos clients de faire un choix parmi notre catalogue en ligne et d’attribuer à la clé sélectionnée une symbolique de son choix telle que la clé du bonheur, la clé de la réussite ou la clé de l’amour et tant d’autres.
Nous nous distinguons de toutes les autres marques de bijoux en ce sens que nous proposons une véritable expérience d’achat. En effet, le choix d’une clé se fait dans un panel éclectique tant en terme de forme, taille ou revêtement (or jaune, or rose, ruthénium, palladium). Chaque clé semble incarner une personnalité, une âme, une histoire et ces caractéristiques vont rendre l’acte d’achat particulièrement original. Il l’est plus encore lorsqu’il s’agit d’associer le symbole à la clé. Déterminer le symbole qui siéra au plus près de la personne destinée à recevoir la clé est une partie importante de cet acte d’achat particulier.
Et l’expérience ne fait que commencer parce que l’acheter est l’acte I. L’offrir est l’acte II, il faut voir l’effet qu’elle produit sur la personne qui ouvre le paquet cadeau. L’acte III c’est lorsqu’on porte à son cou la clé du bonheur, par exemple, je vous laisse imaginer 🙂
A l’opposé des linéaires ordonnant des dizaines de produits identiques et sans âme, l’expérience Le Cléateur propose un achat en pleine conscience.
L’expérience Le Cléateur propose un achat en pleine conscience
D’où est née l’idée ?
Dans un contexte de tour du monde avorté pour cause de graves problèmes de santé, le territoire français nous gardant pour quelques temps, histoire de solder lesdits soucis. En voyage en camping-car, nous cherchions un moyen pour gagner notre vie tout en préservant notre liberté sous forme d’un projet d’entreprise nomade, ouverts à toutes opportunités. Lors d’une escale dans le Limousin, une clé orpheline peinte et transformée en objet déco nous a donné l’impulsion de travailler sur l’objet clé associée aux symboles d’ouverture intrinsèquement liés. Elle est devenue notre clé de la liberté.
Comment l’avez-vous mis en place ?
Nous nous sommes rapidement rendu compte que toute notre vie et toute cette activité ne tiendrait pas dans notre camping-car, alors nous nous sommes sédentarisés, gardant à l’esprit que c’était pour un temps. L’internationalité de notre concept était si flagrante que nous avons très rapidement commencé à installer notre marque et notre image sur la toile et les réseaux sociaux. Si notre boutique en ligne a un an d’existence, Google nous connait depuis 3 ans.
Qui êtes-vous ?
Nous sommes Amina et Phileas, binôme en affaire, couple dans la vie et heureux parents de deux jeunes hommes de 25 et 21 ans et d’une princesse de 8 ans.
Passionnés d’entrepreneuriat et de créativité au sens le plus large du terme, nous avons tous les deux eu un parcours mixant le salariat et l’entrepreneuriat depuis nos vingt ans respectifs.
Parisiens d’origine, puis un temps aveyronnais, nous avons tout plaqué pour partir en tour du monde, en commençant par l’Inde et la Thaïlande. Des soucis de santé avec complications nous ont ramenés puis maintenus sur le sol français où la bougeotte nous a menés à ses quatre coins en camping-car. C’est lors de ce périple que nous avons rencontré notre fameuse clé de la liberté.
Quels sont vos plus beaux moments depuis le début du projet ?
Le e-commerce est quelque chose de très impersonnel et peu propice aux échanges et nous affectionnons particulièrement les rencontres dans la vraie vie. Ainsi, quelques participations à des concept-stores ou des rencontres en « one-to-one » avec nos clients sont toujours des moments privilégiés parce qu’ils nous offrent l’occasion d’inviter nos visiteurs en direct dans notre univers et de les faire s’immerger dans leur expérience d’achat.
Nous ne sommes pas des vendeurs mais des entremetteurs, nous organisons une conjonction entre une personne et sa clé. Il n’y a pas d’acte de vente, seulement une rencontre et un acte d’achat. Nous avons vécu un grand moment aussi lors de notre première commande expédiée en Californie. Grande satisfaction de se dire qu’une petite entreprise comme la nôtre puisse être visible depuis les États-Unis.
Il n’y a pas d’acte de vente, seulement une rencontre et un acte d’achat
Quelles sont les valeurs portées par Le Cléateur ?
Le Cléateur se veut un vecteur de liberté. La clé est l’objet, le code ou la solution qui permet d’avancer, d’aller plus loin et de se mettre en sécurité. La liberté d’entreprendre, de penser, d’aimer, la liberté d’être, tout simplement. Des valeurs humanistes, pacifiques, éthiques, écologique sont nos carburants.
Comment avez-vous financé votre projet ?
C’est très simple, nous avons vendu notre camping-car.
Où en êtes-vous dans le développement de l’entreprise ?
Nous sommes sur un concept qui nécessite qu’on l’assoit sur des fondations solides, notre histoire est fondamentale.
Tout cela prend beaucoup de temps, le soin et la non précipitation étant des ingrédients à choyer particulièrement.
Notre site de e-commerce est notre vitrine ouverte sur le monde. Nous sommes sur un secteur de niche, mais c’est une niche qui a ses succursales dans le monde entier. En effet, l’objet « clé » et les symboles associés trouvent écho dans quasiment tous les pays du globe.
Nous devons passer notre site en bilingue anglais-français pour commencer. Ensuite, nous nous rapprocherons de la presse internationale pour nous faire connaître.
Quelles sont vos stratégies marketing pour vous faire connaitre ?
Dressons le tableau de nos cibles potentielles : Femmes et hommes, de 20 à 90 ans, aimant les bijoux, accessoires de mode ou objets de décoration originaux, réceptifs à la notion de symboles, sensibles à l’histoire, à l’authenticité de leurs achats. De plus, ils sont en quête de personnalisation par l’acquisition d’une pièce unique. Ce qui nous donne une cible tellement large qu’elle est extrêmement difficile à cerner au final.
Notre positionnement est donc délicat parce que nous n’avons pas de client type. En effet, lorsque vous vendez des costumes modernes pour homme, votre cible marketing est l’homme entre 25 et 40 ans par exemple et les femmes de ces hommes qui sont des prescriptrices. Si vous vendez des objets connectés, votre première cible sera les 25/35 ans ayant un bon pouvoir d’achat, passionnés de technologie. Et ainsi de suite.
Aujourd’hui, nous avons identifié une population particulièrement réceptive à notre discours et lui concentrons nos efforts afin qu’ils deviennent nos avant-gardistes. Il s’agit des personnes en quête de développement personnel. Ces clients potentiels au pouvoir d’achat inégal ont un point commun. Ils se rendent capable de dégager des budgets pour assister à des conférences, acheter des livres, suivre des formations et acquérir des objets symboliques en adéquation avec leurs pratiques.
La notion de « clé » est présente dans les écrits, les discours de développement personnel. Nos créations, clé-bijou, clé-mode ou clé-déco trouvent naturellement leur place en tant que porte symbole, tel que la clé du bonheur, la clé de l’épanouissement, etc. Concrètement, pour répondre à ta question, Peggy, nous préparons un dossier de presse et un communiqué de presse que nous adresserons aux magazines de développement personnel tels que CLES, Happinez, Psychologie Positive, etc. Dans la phase suivante, nous tenterons de fédérer nos clients en organisant des rencontres autour de thématiques sur l’épanouissement.
Aujourd’hui, nous avons identifié une population particulièrement réceptive à notre discours et lui concentrons nos efforts afin qu’ils deviennent nos avant-gardistes
L’intuition et le lâcher prise jouent-ils un rôle dans la gestion de votre entreprise ? Sous quelle forme ?
Nos intuitions sont extrêmement importantes et constituent bien souvent nos axes de perspectives, puisque nous sommes sur un marché disruptif, nous ne pouvons pas utiliser des statistiques ou des modèles déjà avérés.
La deuxième phase post-intuitions est le lâcher prise. C’est un point sur lequel nous devons travailler ardemment, ce qui n’est pas simple quand on a le nez dans guidon et peu de marge de manœuvre.
Qu’est-ce qui vous fait vibrer dans la vie ?
Nous sommes globalement sur les mêmes longueurs d’ondes, ce qui est plutôt bien pour vibrer 😉 Notre unité familiale nous apporte beaucoup et nos enfants sont une source de satisfaction inépuisable.
Notre quête de vie est d’être suffisamment à l’abri pour pouvoir aider ceux qui ne le sont pas. Quel que soit le manque d’abri, qu’il s’agisse d’un toit, d’une couverture, de sécurité face à des violences, d’enseignements pour échapper aux conséquences de l’illettrisme, les gens dans le besoin ne manquent pas. Si nous faisons ce que nous pouvons aujourd’hui, nous vibrons pour pouvoir faire plus demain.
Quelle est votre philosophie de vie ?
Fondamentalement, nous sommes assoiffés de liberté. Nous sommes aussi mus par le respect des valeurs humanistes, pacifiques, éthiques, écologiques, comme évoqué plus haut. La simplicité et l’humilité nous caractérisent aussi très bien.
Si c’était à refaire que changeriez-vous ?
On ne peut pas parler comme ça aujourd’hui du fait que nous ne sommes qu’au début d’une aventure qui va nous mener devant des portes dont nous ne soupçonnons pas encore l’existence mais dont nous possédons les clés. Globalement, il n’est pas dans notre philosophie de vouloir changer les choses du passé. Quel qu’en aient été les difficultés, les épreuves du passé nous ont toujours beaucoup appris. Chaque personne rencontrée, bienveillante ou malveillante, parce qu’il en existe dans tous les secteurs, nous a permis de cheminer et de peaufiner qui nous sommes aujourd’hui. Chaque épreuve a contribué à forger la gratitude qui nous habite aujourd’hui.
Pourquoi êtes-vous devenu entrepreneur ?
Amina : Vous allez rire, mais la réponse relève de la psycho généalogie ! Voilà, je suis d’origine indo-malgache, née à Madagascar, 2ème pays le plus pauvre au monde après Haïti, pays du système D si l’on veut survivre. Je suis indienne par mon père, dont le grand-père avait quitté l’Inde pour survivre.
La 1ère génération de ma famille indienne était des commerçants à leurs comptes (souvent des petites boutiques où l’on vend un peu de tout, du moment que ça fasse vivre la famille en toute indépendance).
La 2ème génération, plus aisée, a été en mesure d’investir dans du vrai patrimoine : achat d’immeubles, création d’une salle de cinéma, de restaurants, etc.
La 3ème génération, celle de mon père, avait le choix entre entretenir ce patrimoine ou chercher l’Eldorado en France, car le gouvernement français avait offert la possibilité aux personnes issues de l’immigration indienne de s’installer en France.
Comme nous avons le sens de l’adaptation et le goût du renouveau dans les gênes, devinez quel était leur choix ? Celui de tout recommencer depuis presque zéro, car l’écart entre la monnaie française et la malgache n’a pas permis à ma famille de s’installer avec aisance.
C’est donc tout ce qui m’a été transmis par ma famille depuis 3 générations, qui a forgé mes convictions d’entrepreneur, nourri des valeurs d’indépendance, d’adaptation et de persévérance.
Phileas : depuis que j’ai commencé à travailler à 18 ans, j’ai toujours pensé qu’il n’était pas tout à fait juste de donner toute une vie de labeur pour enrichir d’autres que soi. Alors qu’on pouvait donner toute une vie à s’enrichir soi-même, l’enrichissement n’étant pas que financier. Lorsqu’on est entrepreneur dans l’âme mais qu’on n’a pas de métier, on est ouvert sur tout ce qui se dit, se passe, s’écrit ici et là. J’ai toujours eu avec moi des calepins dans lesquels je notais mes « idées de business », ça ne m’a jamais quitté. J’ai travaillé sur des dizaines de projets et entrepris concrètement quatre fois. Je suis encore capable d’être un salarié mais je n’imagine pas ma vie sans perspectives entrepreneuriales.
Je suis encore capable d’être un salarié mais je n’imagine pas ma vie sans perspectives entrepreneuriales
Comment voyez-vous l’entrepreneuriat de demain ?
Nous croyons beaucoup que la technologie va avancer et investir tous les secteurs. Cependant, des « nouveaux entrepreneurs » reviendront aux techniques ancestrales, aux façons de faire des anciens et ceux-là, qu’on appellera les « nouveaux modernes » n’auront rien à envier aux « technos » parce que le cerveau humain a besoin d’imprimer à l’ancienne pour que ça soit durable.
Par exemple, on voit se développer de nouveaux supports de travail version papier afin d’aider les personnes à organiser leurs journées. L’entrepreneuriat de demain sera d’un côté hyper « geek », « uberisé » et d’un autre côté plus mixe, alliant nouvelles technologies et valeurs humaines.
L’entrepreneuriat social et solidaire, l’agriculture biologique, l’économie circulaire sont des secteurs qui vont se développer par nécessité absolue. Ces derniers domaines véhiculent des valeurs de développement durable ayant vocation à minimiser l’impact sur l’environnement, optimiser le respect des valeurs humaines et sociales tout en assurant un développement économique.
C’est quoi votre projet cadenas d’amour ?
Phileas : Durant l’été 2014, un couple chinois ayant entendu que la mairie de Paris voulait « nettoyer » les cadenas d’amour du Pont des Arts, nous a demandé de retrouver le leur (un cadenas de style ancien), trouvant bien trop triste et anti-romantique l’idée de le voir recyclé en plaque d’égout ou en culasse d’obus.
En décembre 2014, lorsque j’ai eu la traduction de leur e-mail, je me suis rendu sur le Pont des Arts pour prendre la mesure de la tâche et ai réalisé que c’était comme chercher une aiguille dans une botte de foin. Ce qui était cependant possible, c’était de faire pour d’autres couples ce que ce couple chinois nous avait demandé. J’ai alors tenté de sauver le maximum de cadenas anciens que je pouvais réussir à ouvrir avec mes clés anciennes.
J’en ai aujourd’hui environ 700, qu’une équipe de bénévoles m’aident à répertorier, photographier pour les exposer sur internet afin de tenter de retrouver les heureux amoureux poseurs de cadenas.
N’est-ce pas un peu fou ?
Ce n’est pas qu’un peu fou mais c’est aussi une démarche artistique. Que faire face à la Mairie de Paris qui sans état d’âme a tout fait disparaître du Pont des Arts et ne sait elle-même pas comment garder la tête haute face à tous les touristes étrangers amoureux de Paris qui avaient confié à la capitale leurs serments d’amour ?
J’ai en ma garde des cadenas vraiment spéciaux, pas de ceux qui nous servent à boucler la porte de notre cave mais de véritables pièces de collections gravées à l’autre bout du monde avant de faire le voyage vers Paris. J’en ai un, par exemple pensé, gravé et accroché là par la famille d’une mamie décédé qui devait certainement être amoureuse de Paris. C’est un témoignage absolument magnifique que je refuse de voir disparaître. Ce cadenas n’est pas arrivé là par hasard et fait maintenant partie du patrimoine romantique de Paris.
Voici sa photo :
Ce qui est fou surtout, c’est que toutes les nationalités de touristes se sont donnés rendez-vous sur le Pont des Arts et que le million de cadenas qui s’y trouvait a fait des millions de déçus de Paris. Où qu’ils soient, ils ne comprennent pas les raisons qui ont poussé la Maire de Paris à prendre une telle décision.
Lorsqu’en juin 2015 le pont a été fermé au public pour entamer les travaux de démontage, les médias français dans un premier temps puis internationaux se sont tournés vers moi pour diffuser une version romantique de cette affaire.
Ainsi, aujourd’hui si l’on cherche « Phileas le cléateur » sur Google, les réponses émanant de médias turcs, chinois, canadiens, américains ou africains côtoient closer.fr, positivr.fr, BFM tv ou RTL où je suis passé dans « les grosses têtes » par exemple.
Les nombreux témoignages que nous avons reçus depuis cette médiatisation nous montrent des amoureux qui ont fait le tour du monde pour visiter l’Europe et surtout Paris avec la ferme intention de confier un sentiment profond au Pont des Arts. Il s’agit d’un geste d’amour, contrairement à tout ce que les détracteurs peuvent en dire lorsqu’ils comparent cela à de la pollution. A voir l’état de nos trottoirs, de nos rivières et nos océans, il y a bien pire comme pollution.
Pour finir sur une note joyeuse, je suis en contact avec un jeune couple australien qu’une américaine a retrouvé en fouillant le net après avoir vu leur cadenas sur mon Instagram. Les interconnections rendues possibles par l’internet sont d’une puissance insoupçonnée.
Pour aller plus loin…
- Le livre
Vous pouvez vous offrir mon livre Changez de vie, plaquez tout pour créer votre boite ! Manuel inspirationnel à destination des (futurs) entrepreneurs en cliquant sur Acheter !