« Je n’étais pas un entrepreneur dans l’âme car je savais que cela allait être compliqué. » C’est ainsi que commence le parcours de Michaël Boumendil, fondateur de l’agence de design musical, Sixième Son. Et pourtant. Michaël a créé sa société à 23 ans, en 1995. « J’ai un parcours simple, puisque je n’ai fait qu’une seule chose dans ma vie : mon entreprise. » Et quelle entreprise ! Puisqu’elle est aujourd’hui reconnue dans le monde entier comme l’un – voire le seul – expert dans son domaine, la création d’identité sonore pour les marques.
« A 19 ans, j’ai eu une intuition en inventant ce terme d’identité sonore, que personne ne comprenait mais aujourd’hui c’est devenu commun car la marque est au centre de l’identité de l’entreprise ». En 21 ans, tout ne fut pourtant pas facile pour Michaël Boumendil : « Quand on innove et qu’on crée un marché, qui plus est sans argent, on s’attend à ce que cela soit dur. Et ça l’a été plus que je ne me l’étais imaginé, surtout financièrement. Cependant, je me suis assez vite rendu compte que ma vision était juste. Une marque a besoin d’être accompagnée dans son identité, pas seulement visuelle, mais dans sa globalité. Ce sont d’ailleurs les autres qui ont été convaincus avant moi de la justesse de ma vision. » Et ce dès le commencement lorsque Michaël Boumendil a présenté son projet à un concours d’entrepreneurs, après ses études à l’EDHEC : « Je n’étais pourtant pas au point dans ma présentation mais j’ai malgré tout réalisé l’enthousiasme que mon projet suscitait ».
Quand on innove et qu’on crée un marché, qui plus est sans argent, on s’attend à ce que cela soit dur
C’est seulement vers 2000-2001, que Michaël Boumendil et son équipe ont réalisé l’ampleur que pouvait prendre leur vision initiale : « On s’est dit qu’on tenait quelque chose, lorsque France Telecom nous a choisi pour réaliser son identité sonore après une compétition face à de grands acteurs. C’est certainement lié à ma façon de vivre la musique, qui pour moi n’est ni un divertissement, ni une émotion, mais un véritable langage ». Les marques ont besoin de s’exprimer, surtout aujourd’hui dans un contexte de concurrence de plus en plus rude, avec l’arrivée en puissance des pays émergents sur tous les marchés. « La musique est un langage de différenciation pour les marques. La vision que j’ai eue, il y a 25 ans, n’a jamais été remise en cause. D’ailleurs, mon intuition n’a pas changé, on va même beaucoup plus loin que ce que j’avais imaginé. Nous avons toujours une longueur d’avance ! Ce sont les marques qui viennent vers nous, qu’elles soient iconiques ou des PME ».
Sixième Son réalise une mission de conseil auprès des marques. Elles sont étudiées de façon poussée pour en comprendre l’essence et la rendre plus attractive, distinctive et comprise par le public. « Les marques ont besoin d’identité sonore autant que visuelle. Il n’y a pas que le logo qui compte dans la création d’une marque à forte personnalité. On donne une voix à la marque qui sera impactante. »
Les marques ont besoin d’identité sonore autant que visuelle
Selon Michaël Boumendil, créer une identité sonore, c’est vouloir faire la démonstration de son professionnalisme et se doter d’outils qui projettent la marque dans le futur. Et cela concerne aussi bien les grandes entreprises internationales que les PME. « Il est difficile de déterminer un budget clé pour une identité sonore. Cependant, même une PME peut réaliser la sienne, dans une fourchette qui peut varier de 30 000 à 50 000 euros. » Il précise ensuite « Pour créer une identité sonore, il faut avoir une véritable histoire à raconter. Il faut avoir une grande maturité pour se lancer dans ce travail et une vision qui permettra de créer la “bonne identité sonore”. Il ne suffit pas seulement d’avoir cinq notes, il faut avoir une perception de la marque dans ces cinq notes ».
Pour faire face à une demande croissante, Sixième Son consacre plus de 15% de son budget à la R&D, en France et à l’international. La musique est un langage qui s’affranchit des frontières et qui ne faiblit pas avec la crise bien au contraire. « La crise a amené les marques à être plus rigoureuses, plus professionnelles et à faire attention à leurs investissements. C’est la raison pour laquelle la crise a été un facteur d’accélération du développement de Sixième Son. Si les marques comprennent que la musique peut être un élément du patrimoine de la marque, alors elles réussissent dans la durée. En effet, la crise amène les marques à optimiser leurs prises de parole musicales, et ceci est au cœur de nos préoccupations chez Sixième Son. La musique doit contribuer à la valeur de la marque et à l’optimiser. J’ai lancé Sixième Son en 1995, au plein milieu d’une crise économique et sociale, avec trois semaines de grève paralysante, qui a entrainé une dissolution de la chambre des députés en 1997, 5 ans de cohabitation politique. Créer en période de crise nous oblige à être hyper bons ! ».
Michael Boumendil conclut notre échange par ce constat « Il faut se challenger et oublier ses certitudes quand on gère une entreprise, quels que soient les aléas traversés. »