Le 28 janvier dernier se tenait Dans le cadre du Cycle « Nouvelles tendances managériales » au siège du MEDEF à Paris,une soirée de réflexion à destination des chefs d’entreprise et dirigeants sur le thème du succès et de la réussite. Une soirée riche en enseignement et de remise en question sur des thèmes qui questionnent chaque entrepreneur, à un moment ou un autre de son parcours, quelque soit son projet, son chiffre d’affaire, sa notoriété et ses dividendes 🙂 L’intervention de Frère Samuel, religieux et philosophe a été des plus marquante :
Samuel Rouvillois appartient à la Communauté Saint Jean depuis 1982. Il passe trois jours/mois en entreprise, laboratoire d’étude, d’observation et de compréhension de l’Homme afin de « comprendre dans la vie économique ce que je ne comprends pas dans ma vie de frère » !
Les dangers du succès représentent pour lui la tarte à la crème du moraliste. Paradoxalement tout le monde a envie de le vivre.
Étymologiquement, le succès est un aboutissement, l’achèvement du processus, ce qui est au bout. C’est une notion qui n’est ni négative ni positive. On y ajoute la reconnaissance publique, en latin la « fama », la rumeur, les honneurs. Une notion qui demande un public et une évaluation positive de ce dernier. En cela le succès est différent de la réussite.
Plus profondément on peut parler d’accomplissement ou de plénitude. On rêve que le succès couronne les accomplissements : « Ce qui valide par les yeux des autres quelque chose que nous avons réussi ». Le succès répond à une attente, il vérifie qu’aux yeux des autres l’on a bien réussi et valide notre progression. Notre propre valeur peut être ainsi validée par la communauté. Cette réussite valide notre qualité. Le succès est politique (au sens de «polis », la cité en grec), il est lié à la communauté, et implique une résonance avec autrui. Il désigne aussi une attente plus profonde dans la durée : le désir d’accomplir sa vie, d’être heureux, même pour les plus ambitieux.
Y a-t-il des degrés dans les formes du succès ? Il y a un succès de plus en plus élaboré :
1. Le premier degré est celui de la médiocrité assumée, des petits plaisirs.
2. Le deuxième est d’entreprendre pour soi. La réussite me valide, renvoie une image de ma propre qualité, je suis capable de faire quelque chose.
3. Le troisième est une réussite qui correspond à un accomplissement, une plénitude. On émerge par soi-
même, avec une authentification de ce qui se passe en profondeur.
4. Le quatrième degré désigne l’entreprise avec autrui. On associe l’autre mais le but est pour soi. On s’associe pour un moment avec les forces de l’autre. Émergent alors la confiance et le partage du risque. Soit on ne gagne pas, soit on gagne à deux, et il y a un partage de la valorisation. Le succès est moins important que la route ensemble.
5. Puis vient l’entreprise pour autrui. Au-delà du succès et de la réussite, on fait émerger autrui. Il y a alors une certaine indifférence à la validation de l’autre, puisque la réussite est intérieure.
6. L’ultime degré des formes du succès est l’entreprise pour tous. Il ne s’exprime pas par une réussite ni par un succès. On n’est plus dans l’identification au héros, on devient le signe (au sens philosophique : ce que l’on montre n’est pas visible) qu’il est possible de traverser l’échec et le non-succès.
La notion de résilience vient alors, comme forme de succès. Elle explique comment la fragilité apprend à être victorieuse, en s’appuyant sur autrui. La part fragile en nous peut s’épanouir. Il existe alors des fragilités heureuses : le bonheur est là et cela marche dans l’entreprise. On peut atteindre ainsi une certaine plénitude. Le succès devient alors invisible et vient nourrir une destinée commune, une âme collective.
Le succès peut devenir un dangers, s’il ne mène qu’à la richesse et au pouvoir. La limite du succès est franchie quand on perd son sens de l’humanité, c’est-à-dire sa conscience d’appartenir à l’humanité. Il ne faut jamais oublier que e succès doit s’accompagner de la transmission