L’entrepreneur est souvent quelqu’un de très seul et se retrouve face à lui-même pour prendre toutes ses décisions. Il peut en parler à ses proches, mais généralement personne ne le comprend et tout le monde tentera de leur remettre dans le droit chemin comme “trouver un vrai job”, “avoir un salaire en fin de mois”, “se pauser”, “arrêter de prendre des risques”, etc… Rien qui ne fera avancer le débat en cas d’interrogations. C’est normal car les amis qui ne vivent pas les mêmes problématiques ne peuvent pas se mettre à la place de l’entrepreneur, mais c’est aussi énervant parfois, car cela peut donner l’impression d’aller droit dans le mur ou de faire n’importe quoi aux yeux des autres juste parce qu’on n’a pas un projet palpable, un business bien visible et une certaine position qui va nous définir. Par exemple “être en recherche d’un local” ou “en développement de sa communauté” pendant plusieurs mois, signifie dans notre société, que nous nous tournons les pouces et que dans 6 mois nous devrons aller travailler chez MacDo pour payer nos factures courantes, après s’être bien amusé à chercher l’inspiration entrepreneuriale…
On pourrait être tenté de dire qu’il ne faut donc pas parler de ses doutes et ses angoisses à son entourage pour ne pas récolter encore plus de stress et passer pour un loser auprès de ses amis et sa famille, mais est-il bon de toujours affirmer que tout va bien et donner une fausse image de la réalité à ses proches ? Entreprendre, ce sont des hauts et des bas en alternance et il y a des périodes où cela ne va pas du tout, de celles qu’on aimerait parler avec ses proches, sans se faire juger. Pourtant ce n’est souvent pas possible. Car on leur renvoie leurs propres peurs. Si nous, on sait qu’on va se sortir de cette mauvaise passe, qui peut d’ailleurs être juste une pause, et qu’on a juste besoin de temps, parfois long mais nécessaire, les autres voient surtout qu’on va droit dans le mur. Car on n’a pas de rentrée d’argent, on n’a pas de projet visible, on va de rendez-vous en rendez-vous plus ou moins productifs, ils ne savent pas vraiment ce qu’on fait et ils se disent que eux à notre place, ils seraient trop stressés, ils ne sauraient pas quoi faire, ils seraient perdus. Donc ils pensent que c’est pareil pour tout le monde, y compris vous. Alors que vous, des périodes comme celles-ci un peu négatives, si vous êtes de ces entrepreneurs qui ont toujours un projet sur le feu, vous savez que vous allez vous en sortir, vous ne savez pas comment ni quand, mais vous croyez aux opportunités qui arrivent quand on est dans le brouillard. Comment expliquer cela à son entourage… C’est compliqué, voire impossible, surtout si leur mode de pensée est rationnelle, comme la plupart des gens…
Il faut avoir une sacrée force de caractère pour rester de marbre devant les peurs des autres et ne pas se les attribuer. Qui n’est jamais revenu d’une soirée entre amis en se disant qu’il faisait n’importe quoi, qu’au moins pour eux leur vie était facile avec comme seule questionnement “on part où en vacances en août prochain ?” dérivant souvent sur “si j’avais fait comme eux, j’aurais fini de payer le crédit de ma maison, j’aurais fondé une famille, je ne me demanderai pas chaque matin si je vais signer un contrat et la vie serait cool”. La vie serait paisible, pas cool, nuance. Pas de souci d’argent, de RSI, de comptable, de banque, un emploi du temps bien réglé, des petits plaisirs, une belle voiture, des barbecues entre amis, un iphone pour chaque enfant, la vie serait chouette effectivement. A 40 ans vous paraitriez 52, mais votre vie serait sans nuage. Sauf que si vous êtes devenu entrepreneur, c’est justement pour ne pas ressembler à vos amis salariés et sans souci, non ?
Alors si vous racontez votre vie d’entrepreneur à vos amis qui n’ont jamais pris de risque professionnel depuis l’obtention de leur diplôme, et qu’ils vous font des sermons, vous donnent des conseils pour rentrer dans le moule et vous renvoient une image d’ado attardé qui ne sait pas gérer sa vie, ses finances, qui n’a pas de règles ni d’horaires, n’écoutez pas et dites vous que ce sont soit leurs peurs à eux, soit ils vous envient. Parce qu’au fond d’eux ils savent que votre vie est plus trépidante et plus intense que jamais la leur ne le sera. Certes, vous avez des bas, très très bas parfois et là ils se disent que heureusement ils ne vivront jamais cela parce que eux ils sont sérieux, ils ont un vrai job, une maison payée, un conjoint qui peut subvenir à leurs besoins et ne font pas investissements hasardeux, mais quand tout va bien pour vous et que vous pouvez vous offrir un palace à New York avec un billet d’avion en classe affaires, parce que vous avez signé un deal en or, et bien eux, cela ne leur arrivera jamais. Sauf pour leur voyage de noces dont ils vous montreront leurs photos toute leur vie. La sécurité, c’est avoir une vie linéaire et ce n’est pas fait pour ceux qui ont une âme de vrai entrepreneur, alors il n’y a pas le choix, il faut accepter d’avoir des périodes noires, les affronter, se dire qu’au bout du tunnel il y a de l’espoir, comme la dernière et la prochaine fois, et que vous saurez toujours rebondir quoi qu’il arrive, même si c’est dur et même si un arc-en-ciel plein de Bisounours ne vous attend pas à la sortie. C’est certainement difficile à faire comprendre à ses amis salariés qui n’ont pas pris de risque depuis l’achat de leur dernière voiture, mais rappelez-vous que cela ne sert à rien d’essayer de convaincre les autres du bien-fondé de ses actions, il faut juste être soi et tourner la page sur des relations qui ne vous apportent rien (et réciproquement certainement), même si ce sont vos amis d’enfance…