Les concours pour entrepreneurs et startupers sont aujourd’hui déclinés sous toutes leurs formes par les associations et les réseaux d’accompagnement de porteurs de projet, par les coworkings qui veulent se faire connaitre, pas les agences de com’ ou prestataires pour démarcher de nouveaux prospects, par les grands groupes qui cherchent l’inspiration à moindre coût, sans oublier les startups week-ends et autre concours de pitchs des accélérateurs et incubateurs. Un peu trop peut-être, même s’ils sont aussi le témoin de cette vague d’esprit entrepreneurial qui déferle sur la France depuis quelques années. Un peu trop quand on regarde la qualité des dossiers reçus lors des présélections notamment.
Beaucoup de “futurs entrepreneurs” envoient leur dossier en nombre à tous les concours pouvant leur donner ce petit coup de pouce nécessaire au développement ou au lancement de leur projet, sans prendre la peine de le mettre en forme, se contentant d’un copier-coller à la va-vite. D’autres ne répondent pas à toutes les questions posées ou participent alors que l’objet du concours n’a rien à voir avec leur idée de business. Ce sont des extrêmes, mais il y en a toujours quelques uns dans toutes les compétitions.
Par contre ce qu’il y a en masse, ce sont les projets en tout début de parcours, parfois juste à l’état de l’idée (peut-être le lendemain d’une soirée entre amis bien arrosée à refaire le monde…) où on se demande comment les initiateurs ont eu l’idée de concourir à ce stade de développement… Sans oublier les dossiers où il n’y pas de prévisionnel financier, aucun mot sur les axes de développement ou le business model, pas d’étude de la concurrence, pas d’informations sur la stratégie communication et marketing qui sera mise en place exceptée “nous ferons un site internet” ou “nous créerons une page facebook”. Cela peut se comprendre car au début, tout cela est étranger à celui ou celle qui se lance. Mais dans ce cas pourquoi participer à un concours où il n’y a aucune chance de remporter le titre face à des projets bien documentés, avec des chiffres cohérents, une offre détaillée, un travail de fond réalisé dans le secteur, et parfois un début de chiffre d’affaire. Il faut bien démarrer effectivement, mais tout comme lever des fonds en amorçage laisse peu de temps pour exécuter son business, passer des mois à participer à tous les concours de la place fait aussi perdre ce temps si précieux, discrédite le projet et son fondateur, donne un léger goût d’amateurisme et ne donne pas envie d’en savoir plus…
Parfois lors des jurys, on a même du mal à choisir la poignée de finalistes tellement les projets ne sont pas bons et témoignent au mieux d’un manque de préparation, au pire d’un “je m’en foutisme” difficilement excusable. Quant aux pitchs des lauréats, certains ne viennent même pas, sans prévenir, d’autres sont en retard, et ceux qui viennent présentent guère mieux que le dossier qui a été envoyé. Lorsqu’arrivent les questions du jury, très souvent ils ne savent pas répondre aux questions, n’écoutent pas les conseils, campent sur leurs positions, ou encore une fois ne montrent aucune aptitude à la bonne gestion de leur futur projet. Les idées peuvent être là, mais cela ne suffit pas. Sans budgétisation des investissements, ni même de tarif à indiquer pour la première offre qui sera proposée, comment démarrer ? Quant à la fameuse question “comment vous faites-vous connaitre ?”, personne ne semble avoir de réponse, sauf à bidouiller un compte facebook en invitant ses amis à liker et partager ses posts. Le site internet semble aussi toujours le Graal pour communiquer, alors que certains devraient commencer par proposer leurs produits sur des market place, faire des salons ou réseauter. L’entretien se termine généralement par “votre idée est bonne, mais le projet est encore trop jeune. Nous vous invitons à vous faire accompagner et revenir candidater dans un an”. Évidemment on ne va pas décourager le porteur de projet, mais nombreux sont ceux qui ne sont absolument pas faits pour créer leur boite, et ce même si le slogan “tous entrepreneurs” est aujourd’hui devenu le mantra du gouvernement et des consultants en entrepreneuriat.
Alors, trop de concours ? Certainement, car s’il y en avait moins, les porteurs de projet réfléchiraient à deux fois avant d’envoyer un dossier non finalisé, ou de venir pitcher au stade de l’idée, alors qu’actuellement, nombreux sont ceux qui viennent juste récolter des avis, remplir leur carnet d’adresses et avoir un peu de lumière sur leur futur projet avant qu’il ne soit lancer. Sans oublier ceux qui passent leur année à les préparer, sans finalement se mettre sur le développement de leur entreprise, et qui une fois qu’ils ont épuisé tous les concours possibles, abandonnent le projet pour devenir salarié, ou disparaitre à l’étranger en “pause inspiration”. C’est bien dommage car cela donne une mauvaise image à la fois des concours et des dossiers, mais aussi du jury qui se voit dans l’obligation de récompenser des projets pour lesquels ils n’ont absolument pas eu de coup de cœur, et auxquels ils ne croient pas. Sans compter le temps passé à étudier les dossiers, délibérer, rencontrer les participants, et remettre les prix. Une situation qui risque à terme de discréditer l’ensemble de l’écosystème entrepreneurial, si personne n’y prend garde. Il est donc temps de revenir à la qualité plus que la quantité dans tous ces concours d’entrepreneurs, bien souvent inutiles pour toutes les parties, si ce n’est un petit coup de projecteur le temps d’une soirée, accompagné d’une coupe de champagne et quelques petits fours…