La plupart des entrepreneurs qui montent une boite le font… Une fois seulement ! Peu d’entre eux revendent leur « bébé » comme ils disent, après y avoir mis beaucoup d’affect et de passion, mais surtout tellement de travail, qu’ils n’imaginent pas recommencer un jour ce dur labeur.
Une fois que toutes étapes de la création, du lancement, de l’exécution et que l’entreprise fonctionne enfin avec succès, assurant un salaire plus que décent, des avantages non négligeables, une liberté incomparable, une vie confortable de « bourgeois notable » dans sa ville, pourquoi faudrait t-il recommencer tout cela, comme un « bleu » sans assurance de succès au final ?
C’est ainsi qu’il y a peu d’entreprises en vente, excepté celles pour « cause retraite » ou au bord de la faillite. Créer une seule boite et la conduire au succès, c’est bien, mais est-on pour autant un entrepreneur à succès ?… La question a le mérite d’être posée. Car on peut se demander ce que ferait tel ou tel chef d’entreprise s’il revendait sa première boite pour en relancer une autre sur un nouveau domaine ? Réussirait-il ou la planterait il ? On ne le saura jamais car il y en a peu qui font ce pari.
Remonter une nouvelle boite, c’est comme si on recommençait sa vie d’adulte au point de départ, tout est nouveau, tout a changé, il n’y a parfois plus personne pour nous soutenir, les équipes qui avaient été formées pendant des années sont restées avec le nouveau propriétaire, l’associé n’a pas suivi la nouvelle aventure, c’est une toute nouvelle vie qui s’annonce avec un champ infini de possibilités certes, mais de gros risques de ne pas assurer comme sur la première expérience. N’est pas serial-entrepreneur qui veut.
Pour autant il peut arriver un moment où l’entrepreneur a vraiment fait le tour de son entreprise et ne se voit pas continuer ainsi jusqu’à la retraite au risque de s’ennuyer à mourir pendant des années. Il n’a pas d’autre choix que vendre alors. Une fois la transaction terminée, il a devant lui plusieurs alternatives : devenir consultant pour aider les autres chefs d’entreprise dans leur gestion, en fonction de ses compétences, reprendre un job de salarié, devenir investisseur dans des startups, rejoindre des boards et conseils d’administration, créer un accélérateur ou un incubateur pour jeunes startupers, ou créer une nouvelle boite. Ce qui semble la solution la plus difficile, même si elle est aussi la plus excitante.
Cela peut se faire dans un domaine complètement nouveau, qui n’a aucune connexion avec sa précédente entreprise, un nouveau métier après avoir repris une formation ou des études, ou une niche qui avait éveillé l’intérêt lors de la gestion de sa première entreprise. Tout est possible et c’est ce qui rend l’aventure plus belle que si vous gardiez votre premier chef d’œuvre toute votre vie. Pas de changement, pas de challenge, pas de risque, la vie s’écoule paisiblement. Dans la mesure de la vie de chef d’entreprise bien sûr, avec son lot de réglementations, réformes, nouvelles normes, crise économique, licenciements, prud’hommes, concurrence, transformation numérique…
Pourtant quand on est entrepreneur dans l’âme, c’est le challenge qui motive, qui booste au quotidien. Relancer un projet fait peur, les freins (souvent dans la tête) sont nombreux et font reculer régulièrement, mais l’envie, le goût du risque, les opportunités réveillent régulièrement cette gniak propre aux vrais entrepreneurs. Ceux qui sont prêts à aller explorer des domaines qu’ils ne maitrisent pas, des business du futur, à retourner à l’école pour apprendre de nouveau, à partir loin de leur Home Sweet Home avec leur petit baluchon pour seul bagage, …
Un entrepreneur c’est différent d’un chef d’entreprise. Il y a d’un côté celui qui se lance des défis permanents, qui prend des risques, qui n’a pas peur de perdre ce qu’il avait durement gagné et qui se sentira frustré de rester dans une vie plan-plan de chef d’entreprise. Celui qui saura très bien gérer sa boite, créera des emplois et de la valeur, fera vivre confortablement sa famille, s’offrira une belle maison et une voiture dernier modèle, qui invitera ses amis (membres de son réseau bien sûr) à des barbecues le dimanche pour parler business, qui partira en vacances dans des palaces aux quatre coins du monde et qui arrivera à la retraite avec un petit pactole. Ce sont deux personnalités, si proches dans leur définition, mais si éloignées dans la réalité. Il faut savoir de quel côté se situé en se connaissant bien pour ne pas passer à côté de quelque chose, que ce soit l’aventure ou le confort.
Créer une deuxième -ou plus- boite est un pari de folie, un risque peut-être pire que la première car l’entourage attend au tournant ce fou qui ose tout recommencé alors qu’il pourrait profité tranquillement de ce qu’il a semé avec sa première entreprise. Le risque de perdre tout ce qui a été gagné avant plane au-dessus de sa tête, il peut se décrédibiliser en cas d’échec (surtout auprès de ceux qui n’ont monté qu’une boite d’ailleurs…), tout planter et tout perdre. Mais le projet est tellement beau que souvent on oublie tout ça et on repart à l’aventure, avec l’insouciance de la jeunesse et les espoirs fous de vivre quelque chose d’intense et merveilleux que seule une poignée d’aventuriers-entrepreneurs aura l’honneur de vivre.